mardi 13 novembre 2012

Engagement politique et 'origines'

Ces quelques phrases sont extraites d'un article du site de l'Express, dont je donnerai le lien un peu plus bas :
Le député UMP du Nord Sébastien Huyghe s'est lui aussi "étonné" que [Monsieur A] ait fait "référence aux origines de [Monsieur B] pour expliquer certains positionnements politiques de ce dernier".
"Une telle réflexion n'est pas digne d'un responsable politique, elle est la négation même de ce qui fonde l'engagement politique, c'est-à-dire la défense de l'intérêt général et la promotion de valeurs. [Monsieur A] semble accréditer l'idée qu'il existerait un certain déterminisme qui priverait l'Homme et donc particulièrement l'homme politique d'une véritable liberté de réflexion et d'action puisqu'il serait prisonnier de 'ses origines'", ajoute M. Huyghe.
"Faut-il rappeler à
[Monsieur A] que c'est ce type de logiques qui ont dérapé par le passé en certaines idéologies éloignées de nos principes républicains", poursuit-il.
Comment ne pas être d'accord ?

C'est bien pour cela qu'il n'y a pas de raison d'être défavorable à la mise en place du droit de vote des étrangers. Il serait ridicule de penser que ces nouveaux électeurs seraient prisonniers de leurs origines et d'un prétendu vote communautaire.

N'est-ce pas, monsieur le député ?

Non ?

Ah, on me souffle que Sébastien Huyghe serait contre le droit de vote des étrangers.

Par contre, il soutient [Monsieur B] dans son duel contre [Monsieur A] pour la tête de l'UMP, comme le rappelle donc l'article cité ci-dessus.

mercredi 25 juillet 2012

Les difficultés du secteur automobile français

L'actualité française semble dominée par les difficultés du groupe PSA et le plan que le gouvernement doit annoncer pour "sauver" le secteur automobile français.

Sans même attendre de lire ce plan, on peut douter de son efficacité, au moins à court terme. Les données du système de contrôle technique au Royaume-Uni (dont les données, portant sur plus de 24 millions de contrôles, sont accessibles en ligne) permettent de très vite comprendre pourquoi :
  • Lexus, 75.3% de contrôles passés avec succès.
  • Toyota, 70.3%.
  • Honda, 69.2%.
  • Audi, 67.8%.
  • Mercedes, 67.3%.
  • Suzuki, 67.1%.
  • Kia, 65.8%.
  • Skoda, 65.5%.
  • BMW, 65.4%.
  • Wolkswagen, 62.9%.
  • Nissan, 61.0%.
  • Citroën, 56.8%.
  • Fiat, 56.0%.
  • Peugeot, 54.7%.
  • Alfa Romeo, 54.6%.
  • Renault, 50.1%.

À l'étranger, les marques françaises n'ont pas spécialement bonne réputation, (comme c'était le cas pour Fiat et Alfa Romeo quand j'étais en France). Quand on rajoute à cela des erreurs stratégiques (combien d'années de retard sur les véhicules hybrides?) et des problèmes de gamme, il ne faut pas s'étonner de la situation actuelle.

Tant que tous ces handicaps ne seront pas surmontés (et cela ne se fait pas d'un claquement de doigts), toute relance du marché profitera avant tout aux constructeurs étrangers.

jeudi 14 juin 2012

Le football irlandais a-t-il un avenir ?

(cet article est la version longue d'un billet posté sur le site d'Europe 1)

Quel avenir peut-on imaginer pour le football irlandais ? Il peut paraitre étrange de se poser la question après seulement un match de Championnat d'Europe, et alors que l'équipe peut encore (mathématiquement) se qualifier pour les quarts de finale. Il est pourtant largement temps d'y réfléchir.

Sauf miracle, le Championnat sera bientôt fini pour l'Irlande. Après avoir raté son entrée dans la compétition face à la Croatie (défaite 3-1), l'Irlande doit maintenant jouer contre l'Espagne puis l'Italie. Perdre un seul de ces matchs serait synonyme d'élimination, et il est fort probable que même un match nul et une victoire ne soient pas suffisant pour accrocher la deuxième place du groupe.

Il faudra alors se pencher sur les matchs de qualifications pour la Coupe du Monde 2014. L'Irlande est dans le groupe C, avec notamment l'Allemagne et la Suède. Quand on sait que seule la première place de chacun des neuf groupes est automatiquement qualificative, et que les huit meilleurs deuxièmes s'affronteront en barrages pour les quatre places restantes, l’optimisme n'est pas forcément de mise.

Se placer dans l'après-2014 n'est pas vraiment plus réjouissant, car il faudra faire sans Shay Given (actuellement 36 ans) et Damien Duff (33 ans), mais aussi probablement sans Robbie Keane (31 ans), Richard Dunne (32 ans) et John O'Shea (31 ans). Tous ces joueurs ont plus de 70 sélections en équipe nationale, et la relève se fait attendre.

Plusieurs facteurs fragilisent le football irlandais.

Il y a tout d'abord la concurrence des autres sports. Sur une ile de seulement quelques millions d'habitants (4.6 millions en République d'Irlande, 6.4 millions en comptant aussi l'Irlande du Nord), il sera toujours difficile de faire émerger suffisamment d'athlètes pour fournir plusieurs sports en joueurs de très haut niveau. La Nouvelle Zélande en est l'exemple parfait. A taille équivalente (4.4 millions d'habitants), le pays peut fournir un réservoir de talents aux All Blacks (en piochant aussi dans les iles voisines), mais derrière le rugby, les autres sports n'obtiennent que peu de résultats sur la scène internationale.

Le problème est qu'en Irlande, le sport numéro 1 est exclusivement irlandais. En effet, le premier sport au nombre de spectateurs est le football gaélique (34% du total tous sports confondus), devant un autre sport gaélique (le hurling, avec 23%), le football (16%) et le rugby (8%). Même si le football reste premier pour ce qui est des pratiquants, il manque clairement de visibilité.

Ce manque de visibilité est directement lié au niveau du championnat local. Alors que le rugby a su structurer ses provinces et garder les meilleurs joueurs en Irlande (avec succès, comme l'a encore prouvé Leinster en conservant son titre européen), le championnat irlandais de football est moribond, et tous les internationaux jouent à l'étranger (principalement en Angleterre).

En plus de six ans de vie à Dublin, je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui suive le championnat national, mais vous croiserez tous les jours des personnes portant le maillot de Manchester United, de Liverpool ou encore du Celtic de Glasgow.

Le dernier joueur basé en Irlande lors de son appel en sélection est le gardien Brian Murphy en 2009, mais il n'avait pas joué. La dernière véritable sélection remonte donc à Joe Gamble et ses deux matchs amicaux en équipe d'Irlande en 2007. Avant lui, il faut remonter à Glen Crowe en 2002 pour retrouver un titulaire de l'équipe nationale jouant dans le championnat irlandais.

Les joueurs, même moyens, préfèrent donc traverser la mer en direction de l'Angleterre, quitte à se retrouver dans des clubs de seconde zone. Sur les 23 joueurs de la sélection pour l'Euro 2012, 18 sont en Angleterre, dans des clubs tels que Everton (7e de Premier League), Fulham (9e), Stoke City (14e) et Aston Villa (16e), mais aussi Hull City (8e de la deuxième division anglaise), Leicester City (9e de D2) ou Milwall (16e de D2).

Comment, dans ces conditions, faire émerger de nouveaux talents ?

Une première solution serait de créer un grand club à Dublin, et de le faire jouer dans le système anglais. La situation ne serait pas inédite. C'est le cas pour six clubs gallois (Swansea City, Cardiff City, Newport County, Wrexham, Colwyn Bay et Merthyr Town), et il y a régulièrement des rumeurs concernant les clubs de Glasgow (Celtic et Rangers), étant donné le niveau en baisse du championnat écossais. D'un point de vue sportif, le potentiel est là, puisque six des douze clubs de première division irlandaise sont à Dublin ou dans sa banlieue proche. A l'exception de 1997, 2005 et 2007, tous les championnats depuis 1995 ont d'ailleurs été remportés par l'un de ces clubs.

Une autre solution serait de regrouper les championnats irlandais, écossais et gallois pour créer une "ligue celte" comme cela a été fait pour le rugby. Les négociations seraient sans doute difficiles, mais pas nécessairement impossibles, tout le monde ayant à y gagner.

Dans tous les cas, il faut faire quelque chose si l'Irlande veut régulièrement se qualifier pour les compétitions internationales, et surtout pour avoir une chance de les gagner. A ma connaissance, aucune équipe n'a gagné le Championnat d'Europe ou la Coupe du Monde en n'ayant aucun joueur dans le championnat national, qu'il s'agisse de grandes équipes (France '98, Brésil '02) ou des victoires surprises comme la Grèce en 2004 (13 joueurs sur 23 évoluaient dans le championnat grec) ou le Danemark en 1992 (13 joueurs sur 20 dans le championnat danois).

mercredi 13 juin 2012

Supporters irlandais

Non, ce billet ne va pas vous donner les moindres détails concernant le supporter irlandais arrêté après le premier match de l'Irlande pour sa conduite en état d'ivresse, ni vous faire partager les aventures de Eamon Keegan et sa passion (elle aussi alcoolisée) pour les seins nus de ses voisines croates dans les tribunes au cours de ce même match. Les tabloids s'en chargent déjà avec un plaisir non dissimulé.

En attendant un article plus fourni sur l'Irlande et le Championnat d'Europe de football, je voulais simplement partager avec vous quelques instantanés de l'ambiance à Dublin. Comme pour chaque évènement sportif, le soutien est visible. Il restera fort tant que l'Irlande sera en lice, peu importe les résultats.

Si vous utilisez Instagram, vous pouvez m'y suivre. Mon identifiant est dperrin, comme sur Twitter (plateforme sur laquelle je live-tweet assidument pendant la compétition, notamment pour les matchs de l'Irlande).


Harry Byrnes
Pub irlandais décoré aux couleurs de l'Irlande (Harry Byrne's à Clontarf, Dublin)


Pâtisserie pro-irlandaise
Gâteaux tricolores dans un supermarché de Dublin


Gourmandise
Je n'ai pas pu résister, et je ne le regrette pas


Voiture décorée
Les drapeaux flottent aussi sur les voitures

vendredi 1 juin 2012

Le vrai problème du salaire minimum

Ce matin Samuel Laurent, journaliste au Monde.fr, a partagé sur Twitter un tableau de données sur l'évolution du salaire minimum et des prix (SMIC horaire brut 1990-2012 et inflation 1990-2010).

Ce tableau a rapidement attiré beaucoup de réponses. Pour mieux comparer l'évolution des deux chiffres, j'ai proposé de prendre 1990 en base 100 pour les deux, et cette information a depuis été ajoutée dans le tableau initial.

La conversation se poursuit en ce moment, et il y a toujours de nombreuses suggestions, comme par exemple prendre en compte le temps de travail payé effectif (la période couvrant notamment le passage de 39 à 35 heures et diverses réformes de heures supplémentaires) ou d'indiquer l'évolution des prix pour les dépenses contraintes (loyer, énergie, alimentation).

Toutes ses suggestions sont intéressantes, et je vous conseille de garder un oeil sur ce tableau, car il promet de devenir de plus en plus informatif.

Le contexte derrière ce tableau est bien entendu les discussions actuelles autour de l'augmentation future du salaire minimum suite à l'élection de François Hollande. C'est un sujet sensible, car le pouvoir d'achat est une préoccupation majeure des Français.

Pourtant, le vrai problème est ailleurs.
Plus que le montant, la principale source de préoccupation devrait être la proportion de personnes devant se contenter de ce salaire minimum.

Comme je le fais souvent sur ce blog, regardons ce qu'il se passe ici, en Irlande.

Le salaire minimum est à peu près équivalent. En 2007, il était de 1403 euros en Irlande, contre 1258 en France, mais en prenant en compte la différence de niveau de vie, la valeur ajustée était quasiment la même (1150 en France, 1141 en Irlande). Pour plus de détails sur ces données Eurostat, vous pouvez regarder ce PDF. A titre informatif, la valeur brute est désormais 1462 euros en Irlande et 1398 en France. Je n'ai pas les valeurs ajustées, mais avec la différence d'inflation liée à la crise, je suppose qu'elles sont restées très proches.

La plus grande différence est qu'en Irlande (chiffres 2007 toujours), seulement 3% des employés doivent se contenter de ce salaire minimum. Si on prend en compte les 2.2% qui sont en dessous, on a donc près de 95% de la population au travail qui gagne plus que le salaire minimum. En France, la même année, 16.8% des employés sont au SMIC.

La situation n'est pourtant pas irréversible. En 1999, 21% des travailleurs irlandais touchaient le salaire minimum.

La vraie question pour le nouveau gouvernement ne devrait donc pas être de savoir de combien augmenter le salaire minimum (puisque nous savons tous que la hausse sera faible par rapport aux difficultés réelles des personnes concernées), mais plutôt de mettre en place une politique économique qui mette fin à cette pyramide des salaires tassée vers le bas.

mercredi 30 mai 2012

En route vers l'Euro 2012 !

Fin prêt pour le Championnat d'Europe de football :

Si vous me suivez depuis suffisamment longtemps (sur Twitter ou sur mon autre blog), vous savez que j'aime le sport, aussi bien en tant que pratiquant (rappelez-vous par exemple Project Biwa) qu'en tant que spectateur (regardez notamment les photos que j'ai postées ici ou ).

La saison de rugby touche à sa fin. C'est déjà le cas pour mon équipe (Leinster, encore une fois champion d'Europe, bravo à eux), et le décalage horaire va m'empêcher de suivre de près la tournée estivale du XV d'Irlande (trois matchs chez les All Blacks). Il ne me reste donc plus que la fin du Top14, en espérant que l'ASM aille au bout.

La saison de baseball suit son cours au Japon, mais entre le décalage horaire et les choix désespérants du nouveau coach de mon équipe (les Hanshin Tigers), il n'y a pas de quoi s'emballer pour le moment.

En attendant les Jeux Olympiques, l'autre évènement sportif à ne pas louper est donc le Championnat d'Europe de football. A J-9, je suis fin prêt !


Qui soutenir ?

Français habitant en Irlande, je suis confronté à un dilemme. Qui soutenir ? Le pays de ma famille et de mon enfance, dans lequel je ne vis plus depuis des années mais auquel je reste attaché (ce blog en étant par exemple la preuve), ou le pays dans lequel je suis installé, dans lequel mon premier enfant va naitre et dans lequel je me vois plus tard vieillir ?
Ce n'est pas simple...

J'y reviendrais peut-être d'ailleurs plus tard : on a un regard différent sur les polémiques récurrentes sur les drapeaux et autres sujets sensibles, quand on est soi-même immigré.

Bref, pour revenir au sport, il me faut choisir. Le hasard ayant bien fait les choses, les deux équipes ne sont déjà pas dans le même groupe.

Pour le rugby, il n'y aurait pas eu de doute. Je supporte l'Irlande depuis très longtemps (l'époque où leurs résultats étaient franchement mauvais), avant même de m'installer à Dublin. En partant de cette base, j'ai décidé de soutenir en priorité l'Irlande, tout en souhaitant bien sûr à la France de faire le meilleur parcours possible. La question du choix se posera peut-être les deux équipes s'affrontent. Vu le tirage, ce serait soit en quart de finale (ce qui est possible), soit en finale (ce qui est beaucoup moins probable).

Il faut aussi être honnête et admettre que l'Irlande a aussi un net avantage en ce qui concerne l'ambiance. Fermez les yeux, imaginez-vous dans un pub, une Guinness à la main, et écoutez la chanson officielle des supporters pour ce tournoi. Comment ne pas soutenir l'équipe après ça ?!



Ça ne va pas être facile :

Soutenir l'Irlande est une chose, mais l'équipe a-t-elle la moindre chance dans ce tournoi, ou est-ce que je me suis engagé dans une série de déceptions annoncées ? Un rapide coup d’oeil au groupe C a en effet de quoi faire peur.

Le premier adversaire de l'Irlande est la Croatie, qui est classée 8e au classement FIFA et 10e au classement Elo. Si on regarde le classement de l'Irlande (18e avec les deux méthodes), on comprend que l'équipe ne sera pas en position de force. Et pourtant, beaucoup semblent penser que ce sera le match le plus à leur portée.

Cela se comprend quand on sait que le match suivant est contre l'Espagne, championne du monde, championne d'Europe en titre, et première des deux classements internationaux. On a connu adversaire plus facile...

Si l'Irlande est encore en course pour la qualification au moment d'aborder son dernier match, il faudra obtenir un bon résultat contre l'Italie. Les italiens ne sont pas forcément au mieux de leur forme, par rapport à leurs standards habituels, mais ils restent 12e au classement FIFA, et 11e du classement Elo.

Il faudrait donc un exploit pour que l'Irlande arrache un des deux premières places du groupe et se qualifie pour les quarts. Est-ce possible ?


Les raisons d'y croire :

Pour se qualifier à l'Euro, l'Irlande a d'abord fini deuxième de son groupe derrière la Russie. Au cours des qualifications, l'Irlande n'a perdu qu'un seul match (3-2 à domicile contre la Russie, en octobre 2010), pour six victoires et trois nuls. A titre informatif, le même parcours (6-3-1) a permis à la France de remporter son groupe de qualification.

Il a ensuite fallu battre l'Estonie en match de barrages. Tout s'est joué à l'aller, avec une victoire 4-0 à l'extérieur. Le match retour à Dublin était alors presque une formalité, et s'est fini sur un nul, 1-1.

A partir du moment où l'Irlande est qualifiée, elle n'a plus rien à perdre, et jouera sa chance à fond. C'est une caractéristique du parcours irlandais à travers les compétitions. La qualification est rare (seulement trois Coupes du Monde et un seul Championnat d'Europe avant celui-ci), mais à chaque fois que l'Irlande peut participer, elle fait beaucoup mieux que son classement pourrait le laisser penser.

En 1988, pour sa seule participation à un Championnat d'Europe, l'Irlande se classe troisième de son groupe, avec une victoire contre l'Angleterre (qui faisait partie des favoris du tournoi), un nul et une défaite.

En 1990, première participation à une Coupe du Monde. L'Irlande tient en échec l'Angleterre et les Pays-Bas (1-1 à chaque fois), et se qualifie avec trois matchs nuls. L'équipe élimine ensuite la Roumaine en huitième, avant de perdre 1-0 en quart contre l'Italie à Rome.

L'Irlande est à nouveau qualifiée pour la Coupe du Monde en 1994. Elle se retrouve dans le groupe E (avec l'Italie, le Mexique et la Norvège). Ce groupe reste dans l'histoire de la Coupe du Monde comme étant le seul groupe à finir avec toutes les équipes à égalité avec une victoire, un nul et une défaite. L'Irlande se qualifie en 2e position, notamment grâce à sa victoire 1-0 sur l'Italie. Le parcours s'arrêtera en huitième, avec une défaite 2-0 contre les Pays-Bas.

Huit ans plus tard, l'Irlande retrouve une compétition internationale avec la Coupe du Monde 2002. L'équipe tient en échec le Cameroun et l'Allemagne (1-1 à chaque fois), et bat l'Arabie Saoudite 3-0 pour se qualifier en deuxième place. En huitième, l'Irlande donnera toutes les peines à l'Espagne (1-1 après prolongations), mais cèdera finalement aux tirs au but.

Dix ans plus tard, l'Irlande est de retour. Peut-elle poursuivre sa série de bons résultats obtenus à chaque participation ?

Ses derniers résultats laissent espérer que oui.

Depuis sa défaite contre la Russie, en octobre 2010, l'Irlande n'a perdu qu'un seul match encore une fois 3-2 à domicile, cette fois-ci contre l'Uruguay. C'était en mars 2011.

Entre ces deux rencontres, l'Irlande a joué quatre matchs, pour trois victoires et un nul. Au passage, elle marque dix buts, et n'en encaisse qu'un seul. Depuis l'Uruguay, douze matchs. Sept victoires (dont une victoire 2-0 en Italie), cinq nuls. Seize buts marqués, quatre encaissés.

Ce n'est pas un parcours de futur champion (sauf grosse surprise), mais ce n'est pas non plus le parcours d'une équipe éliminée au premier tour.

Allez l'Irlande !

vendredi 25 mai 2012

Un regard nouveau va entrer à l'Assemblée

Est-il normal que les Français qui ont fait le choix de vivre à l'étranger soit représentés à l'Assemblée Nationale ? La question s'est posée au moment du débat sur la réforme de la constitution française de juillet 2008.

Quatre ans plus tard, nous sommes en pleine campagne électorale, et les Français de l'étranger sont sur le point d'élire onze nouveaux députés. Habitant Dublin, je suis un électeur de la troisième circonscription des Français établis hors de France qui recouvre toute l'Europe du Nord, de l'Irlande et l'Islande à l'ouest jusqu'aux pays baltes et la Finlande à l'est.

Vus les candidats en lice dans ma circonscription, je pense que le parcours de beaucoup d'entre eux justifie a posteriori, et à lui seul, la création de ces onze circonscriptions. Je ne parle pas des programmes eux-mêmes (il y a de tout, du bon et du moins bon, comme à l'échelle nationale), mais bien des individus et de leurs expériences.

Un des principaux reproches que je fais à la politique en général, et aux débats français en particulier, est de ne regarder que vers l'intérieur, et de ne s'ouvrir que trop rarement et de façon trop superficielle. C'est notamment le cas avec la mode des "modèles" successifs (suédois, irlandais, allemand) qui ne sont jamais étudiés en profondeur.

Quiconque a beaucoup voyagé ou, encore mieux, vécu à l'étranger sait pourtant que l'expérience est très enrichissante, qu'ouverture sur l'autre ne veut pas dire négation de soi, et qu'au contraire la pluralité des épreuves et des pratiques permet de progresser.

Il est donc réjouissant de se dire qu'un parcours personnel un peu à part du député "de base" va probablement faire son entrée au Palais Bourbon.

Au choix, nous avons par exemple un normalien agrégé de philosophie travaillant à Londres pour la Banque Européenne de Reconstruction (Gaspard Koenig), une franco-canadienne ayant l'expérience du Parlement britannique auprès d’un député travailliste (Axelle Lemaire), une chef d'entreprise passée par le monde de la recherche (Emmanuelle Savarit), mais aussi vingt ans d'expérience de vie à l'étranger, au Japon puis au Royaume-Uni (Yannick Naud) ou encore une personne qui s'est montrée prête à se battre pour le pays, aussi bien en termes d'obtention de sa naturalisation que d'engagement dans les forces armées (Will Mael Nyamat).

Peut-on nier que de telles expériences, outre les programmes que chaque candidat défend, ne peuvent qu'être bénéfiques au débat parlementaire ? Leur parcours respectif les rend nécessairement porteur d'un message différent, habituellement peu entendu.

Bonne chance à tous les candidats, et vive la démocratie ! :)

mardi 22 mai 2012

Le vote unique transférable aux législatives

De la même manière que je l'avais fait pour le scrutin présidentielle avec le vote alternatif, je saisis l'opportunité de la campagne législative pour aborder la question du mode de scrutin pour cette élection à travers l'exemple irlandais.

Le principe est assez proche de celui du vote alternatif : au lieu de voter pour un seul candidat, on indique son candidat préféré, mais aussi son deuxième choix, son troisième choix, et ainsi de suite. La principale différence est que, au lieu d'élire une seule personne, il y a plusieurs sièges à pourvoir par circonscription.

Le nombre de voix à obtenir pour être élu est donc différent. Il ne faut plus 50% +1 voix, mais il faut atteindre une voix de plus que le total des suffrages exprimés divisé par le nombre de sièges à pourvoir plus un. (Cette formule est en fait une extension de la première)

Le décompte se déroule ensuite par décomptes successifs, selon la méthode suivante :
  1. Si un candidat a obtenu suffisamment de voix, il est élu.
  2. Si ce candidat a plus de voix que nécessaire, le surplus est transféré aux autres candidats en fonction des préférences indiquées sur les bulletins de vote.
  3. Si aucun nouveau candidat n'atteint le niveau suffisant pour être élu, le candidat ayant réuni le moins de suffrages est éliminé, et les voix qu'il a obtenu sont transférées.
  4. Le processus se répète jusqu'à ce qu'un vainqueur ait été déclaré pour chaque siège ou jusqu'à ce que le nombre de candidats restant en lice soit égal au nombre de sièges encore vacants.
A titre d'exemple, regardons les résultats de l'élection de 2007 dans la circonscription de Dublin-Central (où j'habitais à l'époque). Il y avait eu 34,639 suffrages exprimés, pour quatre sièges à pourvoir, et le quota à atteindre était donc de 6,928 voix. Le tableau ci-dessous résume les décomptes des voix. Les candidats y sont classés en fonction des suffrages reçus au premier décompte, et ceux qui ont été élus sont notés en gras.

Le "poids-lourd" de la circonscription était bien entendu Bertie Ahern, à l'époque encore Premier Ministre, et il a été élu dès le premier décompte, avec presque 6,000 voix de plus que le quota requis. On peut noter que, même il aspire presque toutes les voix de son parti en premier choix, le transfert s'effectue ensuite bien vers ses collègues, et Cyprian Brady est lui aussi élu, au huitième décompte. A l'inverse, Pascal Donohoe n'a que peu de soutiens et ne parvient pas à être élu malgré un bon score initial. (Pour l'anecdote, les choses ont bien changées lors des élections de 2011 : Donohoe a été le premier candidat élu, au deuxième décompte, et Brady éliminé avec seulement 1,753 voix au bout du cinquième décompte)


Candidat Parti Dcpt 1 Dcpt 2 Dcpt 3 Dcpt 4 Dcpt 5 Dcpt 6 Dcpt 7 Dcpt 8
Bertie Ahern Fianna Fáil 12,734






Tony Gregory Indépendant 4,649 5,453 5,622 6,062 6,799 7,385

Joe Costello Labour 4,353 4,793 4,870 5,028 5,809 6,073 6,205 8,018
Paschal Donohoe Fine Gael 3,302 3,441 3,548 3,600 3,896 4,147 4,216 4,556
Mary Lou Mcdonald Sinn Féin 3,182 3,471 3,519 3,744 3,948 4,120 4,178
Patricia McKenna Green Party 1,995 2,116 2,221 2,294



Mary Fitzpatrick Fianna Fáil 1,725 3,087 3,236 3,330 3,447


Cieran Perry Indépendant 952 1,058 1,133




Cyprian Brady Fianna Fáil 939 3,342 3,510 3,554 3,616 5,608 5,764 6,348
Paul O'Loughlin Christian Solidarity 260 269





Patrick Talbot Immigration Control 239 253





Jerry Hannon Progressive Democrats 193 226





Alan Beirne Fathers Rights 116 202







Ce type de scrutin permet une plus grande représentativité des tendances politiques présentes dans le pays. D'une certaine manière, le but est assez proche de celui qu'aurait l'introduction d'une dose de proportionnelle dans le système français mais ce type de scrutin a l'avantage de conserver l'ancrage local des élus, qui est perdu dans le cadre d'une proportionnelle au niveau national.

On peut noter que la "proportionnalité" du scrutin dépend du nombre de sièges par circonscription. Plus il est faible, plus il faut de voix pour être élu, et cela favorise nécessairement les gros partis. Cela ne leur a pas échappé, et il y a eu une tendance à augmenter le nombre de circonscriptions à trois sièges. Cela a été relevé dans un rapport parlementaire de 2010 qui, pour favoriser la pluralité, la parité hommes-femmes et la représentation des minorités, a recommandé que toutes les circonscriptions aient au minimum quatre sièges, sauf en cas de difficultés géographiques (qui rendraient la circonscription trop étendue). Suite au dernier redécoupage, il y a 17 circonscriptions avec trois sièges, 15 avec quatre sièges et 11 avec 5 sièges, pour un total de 166 députés.

Si la Ve République devait un jour être réformé, j'espère que la mise en place d'un scrutin de ce type serait étudiée.

jeudi 17 mai 2012

Réflexions sur l'homoparentalité

Je n'ai pas encore pris le temps de mettre en colonne de droite la liste des blogs que je lis avec assiduité. Il faut vraiment que je le fasse. Un des blogs que je suis depuis très longtemps (début 2006, de mémoire) est celui de Koz Toujours. Je ne suis pas toujours sur la même ligne, mais ses billets sont toujours intéressants à lire.

Je le suis aussi sur Twitter, où il a hier relayé un appel contre l'homoparentalité. Nous avons engagé le dialogue sur cette plateforme (j'ai regroupé la conversation ici si cela vous intéresse) mais le manque de place s'est rapidement fait sentir, et comme je comptais de toute façon poster quelque chose sur le sujet, je saisis l'occasion de le faire maintenant.

Il n'est pas surprenant que des personnes soient opposées à l'ouverture du mariage et/ou de l'adoption aux couples homosexuels. J'ai par contre parfois un peu mal à comprendre leurs arguments, comme c'est par exemple le cas de cet appel.

L'appel considère, et c'est la base de leur opposition, qu'avoir un père et une mère est un droit fondamental de l'enfant, et que l'homoparentalité constitue une discrimination. Plus qu'un droit, avoir un père et une mère serait même un besoin fondamental.

En quoi est-ce un besoin fondamental ? Qu'apporte un parent d'un sexe donné que l'autre sexe ignorerait et serait incapable d'offrir ? J'aimerais savoir. Si quelqu'un a la réponse, les commentaires sont ouverts.

Supposons un instant qu'il est essentiel d'avoir un père et un mère. Que fait-on des familles monoparentales ? Certes, ce n'est pas toujours un choix (j'ai vécu en tant qu'enfant un exemple forcé de cette configuration), mais il y aussi des femmes qui choisissent d'avoir un enfant seule. Difficile de savoir leur proportion parmi les mères célibataires, mais j'en connais plusieurs donc je suis au moins sûr d'une chose : elles existent. Faut-il leur interdire d'avoir un enfant ? Si on suit le raisonnement de l'appel, elles privent leur enfant d'un droit fondamental.

Que faire du droit à l'adoption pour les célibataires ? Eux aussi sont mal équipés pour répondre, selon les termes de l'appel, au besoin fondamental de leur enfant.

Voici ce que nous pouvons lire : "Cet appel vise à protéger les enfants contre la privation délibérée d’un père ou d’une mère, sans pour autant stigmatiser les personnes homosexuelles".

L'adoption par les célibataires est-elle une privation délibérée d'un père ou d'une mère ? Par définition oui, et il faut donc être cohérent. Il n'y a que deux options : avoir un père et une mère est indispensable, ou ne l'est pas.

On me répond que les choses peuvent se passer tout à fait bien dans une famille monoparentale, mais que cela n'en fait pas pour autant la meilleure possibilité. Cela mériterait de se pencher sur ce qui permet de hiérarchiser les structures familiales (sur quels critères, par exemple?), mais admettons que cela soit exact, et que la solution ne soit pas pas si bonne.
Elle est quand même assez bonne pour ne pas être remise en cause par l'appel.

L'appel prend le parti de se placer sur le terrain des valeurs, des droits fondamentaux. Je suppose donc que les choix ne sont pas purement stratégiques.
Peut-on donc en conclure que les rédacteurs et les signataires de l'appel acceptent le principe des familles monoparentales, notamment par choix (grossesse solitaire ou adoption) ?

L'adoption par une personne célibataire est légale, que la personne soit un homme ou une femme (même si en pratique le premier cas est largement plus rare). La société reconnait donc qu'être élevé par le représentant d'un seul genre est acceptable.

Si un parent seul peut élever un enfant de façon suffisamment bonne, sur quels critères peut-on dire donc que deux parents ne seraient pas à la hauteur ?

Prenons quatre cas : un couple hétérosexuel, un homme célibataire, une femme célibataire, un couple homosexuel.

Pourquoi le dernier cas est-il jugé inopportun ?
Ce n'est pas une question de nombre. Il y a deux personnes, comme dans le premier cas.
Ce n'est pas un question de genre. Il n'y a que des femmes, comme dans le troisième cas, ou que des hommes, comme le deuxième cas.
Quel est donc la seule différence ?

Quand on qualifie une structure familiale précise de droit fondamental, il faut assumer jusqu'au bout. L'appel n'a de sens que s'il rejette explicitement toute adoption qui n'est pas fondée sur le principe d'une famille avec un père et une mère. Cela serait peut-être moins populaire, mais cela serait plus cohérent.

Pour ma part, je pense qu'un enfant peut s'épanouir dans les quatre cas et, si on suppose que les futurs appels seront plus cohérents, c'est bien là que se situera le coeur du débat.

De quoi un enfant a-t-il besoin ? Je passe sur les besoins matériels (alimentation, etc.), car il est évident qu'aucun des quatre cas ne met l'enfant en difficulté sur ces questions. Un enfant a aussi besoin d'amour mais, là encore, il ne serait pas sérieux de penser qu'un des cas représente par nature un déficit affectif. L'autre élément essentiel est l'éducation (dans tous les sens du terme), mais pourquoi un parent d'un sexe donné serait forcément plus efficace qu'un parent du sexe opposé ?

Je lis aussi parfois que l'homoparentalité n'est pas légitime, car elle n'est pas naturelle. Deux femmes ne peuvent pas avoir d'enfant ensemble, et elles ne devraient donc pas avoir le droit d'en élever un ensemble.

C'est faire un raccourci entre la nature et l'organisation de nos sociétés. S'il s'agit vraiment d'invoquer la loi naturelle, regardons par exemple les animaux, et les nombreux exemples où les jeunes sont élevés par des groupes de femelles. Procréation et éducation sont strictement séparées, et cela ne semble pas perturber leur développement.
On en viendrait presque à regretter que les lionnes ne couchent pas ensemble, pour en finir avec les doutes sur l'homoparentalité.

mardi 15 mai 2012

Liste des candidats de notre circonscription

La liste des candidats à l'élection législative pour la troisième circonscription des français établis hors de France (qui regroupe Danemark, Estonie, Finlande, Irlande, Islande, Lettonie, Lituanie, Norvège, Royaume-Uni et Suède) a été publiée au Journal Officiel.

A partir de cette liste et des informations que j'ai pu trouvées sur Internet, j'ai réalisé le tableau suivant, avec les sites de campagne et comptes Twitter de tous les candidats (donnés ci-dessous dans l'ordre de publication au Journal Officiel).


Candidat Formation politique Site Internet Compte Twitter
Guy Le Guezennec Front National Absent Absent
Lucile Jamet Front de Gauche Absent Absent
Jérôme de Lavenère Lussan Indépendant Lien @jlussan2012
Denys Dhiver Parti Chrétien-Démocrate, France-Ecologie Lien @DenysDhiver
Bertrand Larmoyer Indépendant (?) Absent Absent
Ezella Sahraoui Parti Radical de Gauche Lien @EzellaSahraoui
Emmanuelle Savarit Union pour un Mouvement Populaire Lien @Savarit2012
Christophe Schermesser Parti Fédéraliste Européen Lien @CSchermesser
Anne-Marie Wolfsohn Indépendante Lien @amwolfsohn
Axelle Lemaire Parti Socialiste Lien @axellelemaire
Marie-Claire Sparrow Rassemblement des Français de l'Etranger Lien @mcsparrowuk
Patrick Kaboza Indépendant (?) Absent Absent
Olivier Bertin Europe Ecologie - Les Verts Lien Absent
Aberzack Boulariah Indépendant Lien @ABoulariah
Olivier Cadic Alliance Centriste Lien @OlivierCadic
Olivier de Chazeaux Alliance Républicaine, Ecologiste et Sociale Lien @o_deChazeaux
Gaspard Koenig Parti Libéral Démocrate Lien @Gaspard2012
Yannick Naud Mouvement Démocrate Lien @yannicknaud
Will Mael Nyamat Indépendant Lien @Nyamat2012
Edith Tixier Solidarité et Progrès Absent Absent


Certaines informations sont manquantes. N'hésitez pas à me les indiquer en commentaire ci-dessous si vous en avez connaissance ou si vous remarquez des erreurs. Je ferai en sorte de mettre le tableau à jour.

Pour suivre la campagne sur Twitter, le hashtag officiel de notre circonscription est #EXTcirco03. Il y a déjà une certaine activité, et cela va probablement s'accentuer pendant la campagne étant donné l'éparpillement géographique de la circonscription.

jeudi 10 mai 2012

L'impôt sur les sociétés

Cela fait des années que je vis à l'étranger, et mon temps s'est divisé entre deux pays que j'aime beaucoup, Irlande et Japon. Du coup, j'ai tendance à rapidement désespérer quand les médias français parlent de ces pays, car ils tombent souvent dans la caricature ou les approximations. C'est sans doute le cas pour beaucoup d'autres sujets, mais comme ces pays me tiennent à coeur, je le remarque plus.

Les reportages sur le Japon se limitent trop souvent à l'actualité nucléaire ces temps-ci, ou depuis toujours sur des phénomènes marginaux (cosplay, gadgets loufoques et autres). Avec l'Irlande, maintenant que la situation au Nord de l'ile se calme, on ne parle guère du pays que pour critiquer sa taxation des entreprises.

Est-elle si choquante ?

Vu de France, il pourrait sembler qu'il n'y a qu'un seul taux pour l'impôt sur les sociétés, fixé à 12.5%. Il y en a en fait un deuxième, à 25%. Pour certaines entreprises (principalement financières) il y a eu par le passé un taux à 10% mais il a été supprimé. Je vous laisse regarder les détails si cela vous intéresse, mais il est à mon avis plus intéressant de prendre un peu de recul.

L'Irlande peut-elle être sincèrement accuser de faire du "dumping" à cause de ce taux de 12.5% ? Ce taux représente-t-il une concurrence déloyale, notamment vis-à-vis de la France ?

Regardons du coté du CAC40. L'été dernier, les journaux ont beaucoup parlé d'un rapport parlementaire traitant de la fiscalité de ces grandes entreprises. Non seulement les entreprises du CAC40 ne payent en moyenne qu'environ 8% d'impôts mais, si on enlève quatre entreprises qui acquittent à elles seules 40% du total payé par l'ensemble (EDF, GDF, France Telecom, Renault), le niveau moyen d'imposition des autres tombe à 3.3%. A priori pas de quoi les faire fuir en Irlande...

Il se trouve qu'un des projets du Président nouvellement élu est de réformer l'impôt sur les sociétés. Le taux ne serait plus de 33.3% pour tous, mais de 35% pour les grandes entreprises (qui s'arrangent de toute façon pour ne pas trop payer, comme nous venons de le rappeler), 30% pour les PME, et seulement 15% pour les TPE. On peut noter que ce dernier taux n'est pas loin du taux irlandais parfois présenté comme honteux par certains.

Il est intéressant de regarder les chiffres officiels de l'OCDE. Si le taux de prélèvement par rapport au PIB est en effet plus élevé en France (44.2% en 2006) qu'en Irlande (31.9%), la différence ne vient pas de l’impôt sur les sociétés. Il est même plus rentable en Irlande (3.8% du PIB) qu'il ne l'est en France (3.0%).

Il serait donc grand temps d'arrêter de se focaliser sur cette question d'imposition des sociétés en Irlande, et de se rendre compte que le pays a bien d'autres atouts qui expliquent l'attrait qu'il a sur les grandes multinationales qui y implantent leurs sièges européens.

mardi 8 mai 2012

Résultats du second tour

Après le premier tour, j'avais posté une analyse du vote des français résidant à l'étranger. Pour être complet, voici donc les résultats du second tour.

Candidat Score en Irlande Score à l'étranger France entière
F. Hollande 59.22 % 46.95 % 51.63 %
N. Sarkozy 40.78 % 53.05 % 48.37 %
Participation 37.74 % (*) 42.18 % 80.35 %


Pour l'Irlande seuls les suffrages exprimés sont donnés par l'Ambassade (et indiqués dans le tableau), donc je n'ai pas la participation exacte. Si on suppose que le nombre de bulletins blancs est dans les mêmes proportions que sur le reste des circonscriptions de l'étranger, la participation réelle est sans doute aux alentours de 38.25%.

On peut noter trois différences importantes :
  • Le vote blanc est plus faible chez les français de l'étranger.
  • Nicolas Sarkozy réalise un très bon score auprès de cet électorat en général.
  • Mais pas du tout en Irlande.

Je pense que le faible vote blanc s'explique par la difficulté à aller voter. Quand aller à l'Ambassade peut prendre jusqu'à plusieurs heures, il est plus rare de se donner la peine d'y aller pour exprimer un refus de choisir entre deux candidats.

Le bon score de Nicolas Sarkozy est sans doute lié à son action sur la scène internationale, qui est régulièrement citée comme un des points forts de son quinquennat. L'UMP a aussi fait campagne auprès des français de l'étranger sur ce que leur couterait une élection de Hollande, et cela a peut-être aussi joué. Il est amusant de noter que ce score (53.05%) est quasiment identique à celui qu'il avait obtenu cinq ans plus tôt (53.06%).

L'Irlande est un cas à part, aussi bien par rapport au total des français de l'étranger qu'au sein de la 3e circonscription (Irlande, Royaume-Uni, Danemark, Estonie, Finlande, Islande, Lettonie, Lituanie, Norvège, Suède), dans laquelle Hollande a un avantage plus proche du score national avec 53.10%. Je n'ai pas eu l'occasion d'en discuter avec d'autres français établis en Irlande mais si je devais proposer une explication, je dirais que la crise y est pour beaucoup. Le pays fait partie de ceux que la majorité sortante a souvent pointé du doigt (alors que la situation est très différente de la Grèce, par exemple) et, à l'inverse, la perspective d'une renégociation du traité était plutôt positivement accueillie par les médias et partis politiques locaux.

En tout cas, cela promet une bataille intéressante pour les législatives. D'ailleurs, en parlant de ce scrutin, je termine par deux petites remarques :
  • L'AFP a communiqué la liste des hashtags pour suivre l'actualité Twitter des différentes circonscriptions. Pour la 3e circonscription de l'étranger, c'est #EXTcirco03.
  • Comme pour la présidentielle, le mode de scrutin des législatives irlandaises est différent, et très intéressant. J'y reviendrai plus tard.

Sources :

samedi 5 mai 2012

Présidentielle, le vote alternatif

Maintenant que la campagne du second tour est officiellement terminée, et en attendant les résultats et le bilan de l'élection, je propose que nous nous posions la question du mode de scrutin.

Le fonctionnement est assez connu. Il suffit (à quelques conditions supplémentaires près) d'être majeur, d'être inscrit sur les listes électorales et de recueillir 500 parrainages d'élus (parmi environ 42,000 parrains potentiels) pour être candidat en France. Un premier tour est organisé entre tous les candidats,  les deux premiers sont sélectionnés pour le second tour, et celui qui obtient alors la majorité des suffrages exprimés est élu Président.

Toutes les élections présidentielles ne fonctionnent pourtant pas pareil. Après la France, je n'ai vécu que dans deux autres pays, et le Japon a un Empereur. Je vais donc m'attarder quelques instants sur le système irlandais. Il n'est pas forcément parfait, mais il est certainement intéressant.

Pour être candidat en Irlande, il faut avoir au moins 35 ans, et il faut ici recueillir des parrainages, mais les soutiens potentiels sont plus rares. Il faut, au choix :
  • réunir 20 soutiens de parlementaires (sur les 226 députés et sénateurs), ou
  • être soutenus par quatre assemblées locales (villes ou comtés, sur un total de 34), ou
  • avoir été déjà Président.
Le poste étant avant tout honorifique (j'y reviendrais dans un futur billet), il arrive qu'il n'y ait qu'un seul candidat. C'était le cas en 2004 quand Mary McAleese, seule candidate à sa succession, a été directement réélue pour son second septennat.

Lorsque l'élection a lieu, elle est organisé sur le mode du "vote alternatif", qui s'organise en un seul tour. Au lieu de choisir un bulletin au nom de leur candidat préféré, chaque électeur a une grille avec la liste des candidats et peut choisir celui qu'il préfère mais aussi indiquer son 2e choix, son 3e choix, et ainsi de suite.

Forcément, cela complique le décompte des voix. Dans un premier temps, tous les premiers choix sont comptés. Si un candidat obtient la majorité des voix, il est élu. Sinon, le candidat en dernière place est éliminé, et tous ses bulletins sont répartis entre les autres candidats en fonction du deuxième choix indiqué sur la carte de vote. Si un électeur n'a pas indiqué de deuxième choix, le bulletin n'est plus compté. Si, avec le nouveau total, un candidat a maintenant la majorité des voix, il est élu. Sinon, on répète le même procédé autant de fois que nécessaire.

Une des particularités de ce type de scrutin est que le candidat arrivé en tête après le premier décompte n'est pas forcément élu. C'est celui qui arrive à faire le plus large consensus, et donc à attirer les votes alternatifs,  qui est le mieux placé pour l'emporter au final. Dans un sens, c'est donc assez proche de la dynamique d'un deuxième tour en France, la campagne d'entre deux tours en moins.

Un tel scénario se produit en 1990, alors qu'il y avait trois candidats. Après le premier décompte, Brian Lenihan était en tête avec 43.8% des voix, suivi de Mary Robinson (38.9%) et Austin Currie (16.9%). Malheureusement pour lui, la majorité des voix du troisième sont allées vers la seconde. Au décompte suivant, Mary Robinson a été élue avec 51.6%, contre 46.2% pour Brian Lenihan et 2.2% de bulletins non réalloués.

Lors de la dernière élection, en 2011, il y avait sept candidats. Au quatrième décompte, Michael D. Higgins a été élu Président. Il était arrivé en tête à chaque étape, après avoir totalisé 39.6% des premiers choix.

Je trouve ce système très intéressant. Il évite par exemple de se retrouver dans une situation "à la 2002", où le candidat qui semblait le mieux placé pour gagner le second tour et devenir Président n'a finalement même pas pu y participer après être arrivé en troisième place au premier tour. Par conséquent, il évite aussi tous les messages appelant au vote "utile", et reflète donc mieux la véritable opinion du corps électoral dans son ensemble.

La France (ou au minimum son système médiatique) semble attachée au duel de deuxième tour, et je ne pense pas que le vote alternatif sera utilisé dans un futur proche, mais j'y serais pour ma part assez favorable.
Qu'en pensez-vous ?

(Si ce billet vous a intéressé, je vous conseille son pendant législatif, sur le vote unique transférable.)

jeudi 3 mai 2012

Quel débat la prochaine fois ?

Comme je le suggérais dans mon précédent post, je pense qu'une des nouveautés de ce débat présidentiel version 2012 est la vérification en direct des chiffres donnés par les candidats. Étant donné leur débit, c'est un bel exploit : pendant le débat Nicolas Sarkozy et François Hollande ont respectivement partagé 92 et 45 chiffres. Puisque leur temps de parole a été de 72 minutes et quelques secondes pour chaque, cela donne un chiffre toutes les 47 secondes pour le premier et un toutes les 1 minute et 36 secondes pour le second !

Plusieurs médias s'y sont collés. J'ai par exemple suivi le flux Twitter du Véritomètre de i-Télé et OWNI. Pour presque tous les chiffres annoncés, quelques minutes au plus après la déclaration, on pouvait lire un verdict (correct, incorrect ou imprécis) avec un lien vers le chiffre exact et la source de cette information. Très utile !

D'autres médias ont fait un effort similaire, que ce soit en direct ou après le débat. La liste est relativement longue, mais on peut par exemple citer les Décodeurs (Le Monde), le Détecteur de Mensonges (Journal du Dimanche) ou encore le Contrôle Technique (Rue89).

Mon principal reproche est que seule une minorité d'électeurs vont avoir accès à ses vérifications et que, paradoxalement, un bon nombre d'entre eux sont ceux qui se seraient donnés la peine d'aller chercher les bons chiffres.

Ce n'est bien sûr pas de la faute des journalistes, mais il serait quand même judicieux de trouver une solution pour faciliter l'accès du plus grand nombre à ces informations. Une possibilité serait d'insérer en bas d'écran la validation des chiffres au fur et à mesure du débat. C'est une première étape, qui ne peut toutefois pas donner satisfaction sur le long terme. Tout d'abord parce que les chiffres défilent trop vite pour que l'affichage puisse suivre. Un décalage de quelques minutes pourraient suffire à déstabiliser les téléspectateurs. L'autre problème est que cela ne met pas l'homme ou la femme politique face à ses contradictions.

Prenons un autre exemple, et le débat entre Nathalie Kosciusko-Morizet et Jérôme Cahuzac lors de l'émission Mots Croisés du 30 avril. Je pense qu'en regardant avec un œil neutre, on peut dire que la première a remporté le débat (au minimum en terme de perception) mais je ne suis pas certain que la bataille des chiffres ne pencherait pas dans l'autre sens. Ce qui m'a surtout frappé, c'est que Nathalie Kosciusko-Morizet a plusieurs fois fait référence à la réforme de la carte militaire et aux économies que cela a permis. Pourtant, selon elle, la réduction des dépenses n'est que (de mémoire) de 350 millions d'euros. Ce n'est pas négligeable, bien sûr, mais une des grandes spécialités de la campagne, à droite, a été de moquer toute proposition de la gauche qui ne faisait pas économiser au minimum plusieurs milliards, sur le mode du "holaaa, ce n'est pas avec ça que vous allez réduire les déficits". Je m'étonne que personne (ni Jérôme Cahuzac ni les journalistes) n'aient fait une remarque là-dessus. Cela aurait pourtant pu changer le cours du débat.

Je pense que cela est dû à une véritable faiblesse du direct, qui permet de faire croire à peu près tout et n'importe quoi, pourvu qu'on y mette le ton juste. Pourquoi ne pas changer un peu ces règles ?

Imaginons un débat divisé entre plusieurs thèmes, pour lesquels chaque candidat a un temps de parole fixe, par exemple 5 minutes, que les journalistes font fermement respecter (pas comme hier où ils se faisaient régulièrement marcher sur les pieds). Ce débat n'est pas diffusé en direct, mais est enregistré, par exemple la veille de la diffusion.

Dès l'enregistrement terminé, le "fact checking" commence, et tout est vérifié et sourcé par des journalistes dont le choix a été approuvé par les deux candidats (pour qu'il n'y ait pas de soupçons de favoritisme envers l'un ou l'autre). Le jour de la diffusion, les candidats sont présents sur le plateau pour une émission en direct. La vidéo (sans coupure) de chaque thème est diffusé individuellement. Après chaque vidéo, les journalistes font le résumé de leur vérification des propos (3 minutes environ), et redonnent la parole aux deux candidats pour répondre aux remarques et poursuivre le débat, cette fois-ci en direct donc, avec par exemple une limite de 3 minutes chacun. On aurait donc 20 minutes par thème avec "fact checking" inclus. Qui dit mieux ?

On traite cinq thèmes par émission (pour une durée totale d'environ deux heures en comptant de brèves introduction et conclusion), et on répète le procédé à intervalles réguliers (par exemple une fois par trimestre en "période creuse", une fois par mois en période pré-électorale, et une ou deux fois entre les deux tours de la présidentielle).

Bien sûr, pour éviter tout soupçon de montage défavorable, l'intégralité de la partie enregistrée serait mise en ligne et accessible dès la fin du direct sur le site de l'émission, qui listerait aussi les sources utilisées par les journalistes.

Il est évident qu'un tel dispositif est contraignant, mais vu tout ce qui était mis en place pour le débat d'hier (aussi bien pour l'émission elle-même que pour tout le dispositif autour, avant et après), cela ne me semble pas irréalisable.

Il y a deux gros risques avec ce genre d'émission. Le premier est la langue de bois, la peur de se retrouver pris en flagrant délit de mauvaise foi (ou de mauvaise maitrise des dossiers). Pour ne pas être pris en défaut, les politiques ne citeraient plus aucun chiffre, et tenteraient de rester le plus vague possible. Ce serait envisageable dans un face-à-face avec un journaliste, mais dans un débat, je pense que l'adversaire arriverait à débloquer la situation en mettant l'accent sur le manque de clarté de celui ne venant pas étayer son propos.

L'autre risque est que la politique en sorte diminuée, du fait des approximations et petits arrangements avec la vérité. Je ne suis pas inquiet, au contraire. Les scores du Véritomètre montrent que la situation actuelle n'est pas désespérée, et mettre l'accent sur la vérification systématique des propos ne peut que favoriser l'amélioration du contenu des déclarations. Il y aurait sans doute des moments difficiles à passer pour certains lors des premières émissions, mais si un tel système était mis en place suffisamment loin des échéances électorales, je suis certain que tout le monde prendrait le pli et aurait le temps de regagner tout crédit temporairement perdu.

Alors, on s'y jette ?
Avouez que cela nous donnerait surement une belle campagne en 2017 !

Mon bilan du débat

Ça y est, le débat est derrière nous. Il a été long (presque trois heures), il a été plutôt rude, et tout le monde se demande maintenant si il changera quelque chose au résultat final. Une autre activité de ce matin est de décrypter les petites phrases, de vérifier les chiffres. J'y reviendrai dans un prochain billet.

Si je devais faire un pronostic, je dirais que le débat n'aura pas changé grand chose.

François Hollande a sans doute froissé de nombreux écologistes quand il a parlé de l'accord avec EELV et des centrales nucléaires, mais ceux-ci sont suffisamment opposés à l'actuel Président pour quand même aller voter Hollande. Les tensions ressurgiront plus tard.

De son coté, Nicolas Sarkozy a probablement gagné quelques voix très à droite avec le passage sur le vote des étrangers, mais ce genre d'amalgame lui en a probablement couté autant au centre, et je ne pense pas que le solde soit positif.

Ce passage mérite d'ailleurs qu'on s'y attarde. J'aimerais le qualifier de dérapage, mais je pense qu'il était malheureusement planifié, (il suffit par exemple de regarder du coté du dernier clip de campagne et du panneau douane écrit en arabe, comme par hasard). Le glissement est net. Il ne parle plus de vote des étrangers, mais de vote communautariste de musulmans. Apparemment, tous les étrangers viennent d'Afrique du Nord, et tous sont croyants. Pas d'athées, pas d'immigration asiatique (par exemple), et surtout pas d'individus capables de raisonner par eux-mêmes et de faire des choix en fonction de l'intérêt général. Non, dans les propos de Nicolas Sarkozy, l'étranger est un dangereux musulman, et il ne faut donc pas lui donner le droit de vote. Au passage les français de confession musulmane ont dû apprécier...

Le plus ridicule dans cette argumentation est de finir en disant qu'un étranger présent sur le territoire depuis plusieurs années n'a qu'à demander la nationalité française. Je voudrais bien qu'on m'explique en comment cela ferait disparaitre le risque communautariste agité plus tôt dans la conversation. Soit on considère qu'un résident étranger est suffisamment intégré pour avoir le droit de vote sans que cela ne pose de risque, soit on assume la vision contraire jusqu'au bout, et on ne lui donne pas la nationalité (qui implique le droit de vote).

Selon les chiffres de l'INSEE, il y a presque 600,000 portugais en France. Il y a aussi 650,000 marocains, mais apparemment selon Nicolas Sarkozy ces derniers seraient beaucoup plus inquiétants. Pourtant, on pourrait dire que portugais, irlandais et polonais sont très croyants (quitte à généraliser, allons-y), et assez nombreux en France. Sur ces trois pays, deux n'ont pas légalisé l'avortement, et le Portugal ne l'a fait qu'en 2007. Il ne me semble pas avoir entendu dire que donner le droit de vote à ces étrangers-là risquait d'entrainer une dérive communautaire et par exemple une remise en cause du droit à l'avortement en France. On constatera d'ailleurs qu'ils ont le droit de vote (merci l'Europe!) et que cela n'a pas posé de problème.

Je ne suis pas spécialement un fan de François Hollande (je suis neutre vis-à-vis de l'individu et partagé sur le programme), et je n'attends pas forcément des merveilles de son probable quinquennat, à part sur quelques points précis comme le mariage pour tous. Une chose est claire, par contre. Il est absolument certain que je ne voterai pas pour quelqu'un qui tient des propos tels que ceux de Nicolas Sarkozy sur les étrangers. Comme je l'ai dit sur Twitter, je garde espoir que cette campagne d'entre deux tours ne reflète pas la réelle vision de la majorité des hommes et femmes politiques de droite mais en attendant d'y voir plus clair, il faut bien faire un choix.

jeudi 26 avril 2012

Droit de vote des étrangers

Un des sujets de l'entre deux tours semble être la question du vote des étrangers aux élections locales. A l'heure actuelle, seuls les citoyens européens y ont droit (depuis 1998 me semble-t-il). Un des candidats qualifiés pour le deuxième tour défend l'extension de ce droit aux autres nationalités (F. Hollande), tandis que l'autre y est fermement opposé (N. Sarkozy).

A voir certaines réactions, on pourrait croire qu'étendre ce droit à tous les résidents étrangers (sous conditions) est quelque chose d'horrible, qui remettrait en cause tous les fondements de la République.

Visiblement, ce terrible danger a été sous-estimé par l'Irlande, puisque je peux voter aux élections locales dans mon pays de résidence. C'est le cas pour tous les résidents étrangers, quelque soit leur nationalité, depuis 1963 !
Il suffit d'avoir 18 ans ou plus au 15 février de l'année en cours, et d'être présent sur le territoire légalement depuis au minimum le 1er septembre de l'année précédente. D'après ce que j'ai lu, ces conditions sont beaucoup plus légères que celles proposées lors de la campagne en France.

En tant que citoyen européen, les mêmes conditions m'ouvrent également l'accès aux élections européennes, et j'ai donc déjà voté à ces deux types de scrutins dans ma circonscription dublinoise.

Les citoyens britanniques, en plus de ces deux types d'élections, peuvent également voter aux législatives, depuis 1985. Le précédent gouvernement avait annoncé en 2008 vouloir étendre ce droit à tous les résidents européens, mais cela n'a pas été mis en place pour le moment. Je ne suis d'ailleurs pas certain que ce soit dans les plans du gouvernement actuel.

Seuls les citoyens irlandais peuvent participer aux deux autres types de consultations (élection présidentielle et référendum).

Presque 50 ans de "vote étranger" en Irlande, et la République n'a pas explosé. Plutôt rassurant, non ?

Je trouve cela d'autant plus rassurant que, durant cette période, le pays a connu beaucoup de difficultés (la crise actuelle bien sûr, mais je pense surtout à la situation en Irlande du Nord, notamment dans les années 70), ainsi qu'une importante immigration au plus fort du Tigre Celtique. S'il y avait un véritable "risque communautariste" comme certains le craignent en France, il aurait largement eu le temps de se manifester ici.

Il y a une raison toute simple à cela : un électeur, étranger ou pas, a un cerveau, et laisser entendre que ce ne serait qu'un mouton au service d'une communauté est très simpliste, et même assez insultant.

Plutôt qu'un risque, je pense que l'extension du droit de vote est une chance, et que cela ne pourrait que favoriser l'intégration des résidents étrangers et leur implication dans la vie locale.

lundi 23 avril 2012

Le vote des français de l'étranger

Vivant à l'étranger, j'ai regardé avec curiosité les résultats concernant les français établis hors de France.

Un premier constant est que notre influence est faible. Il y a certes un peu plus d'un million d'inscrits, mais cela ne représente qu'environ 2.25% du corps électoral, et surtout la participation est souvent plus faible qu'en métropole.
Cela s'explique assez facilement par la distance entre domicile et bureau de vote. En Irlande par exemple, il n'y a des bureaux qu'à Dublin et Cork, et tout le monde ne peut pas se permettre de faire plusieurs centaines de kilomètres pour aller voter.

Cette année, 407 804 se sont rendus dans les urnes, (ce qui donne une abstention à 60.92%, contre 55.78% en 2002 et 57.87% en 2007). Placer ce chiffre face aux résultats nationaux permet de se rendre compte qu'il est plus faible que le nombre de voix obtenues par Philippe Poutou sur l'ensemble du territoire (411 178) ou encore que l'écart entre François Hollande et Nicolas Sarkozy (519 738). Cela relativise notre importance.

Le tableau suivant regroupe les scores obtenus en Irlande, dans l'ensemble des circonscriptions à l'étranger, et sur l'ensemble du corps électoral. Les candidats sont classés en fonction de leur score national. (Note: les chiffres sont arrondis à la deuxième décimale et le total de chaque colonne ne fait donc pas forcément exactement 100%)

Candidat Score en Irlande Score à l'étranger France entière
F. Hollande 31.87 % 28.31 % 28.63 %
N. Sarkozy 26.55 % 38.00 % 27.18 %
M. Le Pen 4.34 % 5.95 % 17.90 %
JL. Mélenchon 10.38 % 8.31 % 11.11 %
F. Bayrou 15.13 % 11.37 % 9.13 %
E. Joly 7.70 % 5.44 % 2.31 %
N. Dupont-Aignan 2.32 % 1.28 % 1.79 %
P. Poutou 0.93 % 0.70 % 1.15 %
N. Arthaud 0.36 % 0.28 % 0.56 %
J. Cheminade 0.41 % 0.36 % 0.25 %
Participation 36.64 % 39.08 % 79.47 %


On lit souvent que les français de l'étranger votent plus à droite que la métropole. Cela est vrai, si on regarde seulement le vote Sarkozy (38% contre 27%, en gros). En regardant de plus près, on se rend rapidement compte que ce n'est pas si simple.

Prenons le total PS, EELV et Front de Gauche. Le score est de 42.05% sur l'ensemble du corps électoral, et de 42.06% pour les français de l'étranger. La différence est infime.

De même, peu de différences chez les quatre plus petits candidats : 3.75% pour l'ensemble des français, et 2.62% pour ceux vivants à l'étranger.

F. Bayrou fait mieux à l'étranger qu'en métropole (environ 2.2 points de plus), mais le plus intéressant est le total UMP+FN, qui vaut 45.08% en France, et 43.95% à l'étranger. L'énorme différence est qu'en France, ce total est à presque 40% pour M. Le Pen, alors qu'à l'étranger il est à plus de 85% pour N. Sarkozy.

En 2007, ce même total valait 41.76% à l'étranger (à environ 92% pour N. Sarkozy) et 41.62% en France (dont le quart pour JM. Le Pen).

Cela montre bien tout le danger pour la droite à faire campagne sur les idées du FN. Cela n'affaiblit pas le total de gauche, mais renforce fortement l’extrême-droite. Les français de l'étranger (un échantillon par nature largement isolé des questions d'insécurité, d'immigration et autres thèmes de ce genre) ne laissent plus aucun doute sur la question.

Les prochains dirigeants de l'UMP seraient sans doute bien inspirés de plutôt parler au centre (total UMP+Modem à 49.37% à l'étranger, mais seulement 36.31% en France) qu'à l'extrême-droite.

(Note: je parle des résultats du second tour dans cet autre article)


Sources :
  • Résultats français de l'étranger : 2002, 2007, et 2012.
  • Résultats à Dublin en 2012.
  • Résultats France entière en 2012.

Retour sur les emails de la campagne

La nouveauté de ce scrutin, pour les français vivant à l'étranger, a été de recevoir des emails de la plupart des candidats. Cela avait fait grand bruit au moment où les messages ont commencé à arriver, au mois de mars, car personne ne s'y attendait.

Il est plutôt pratique de fournir toutes ses coordonnées, email compris, au consulat le plus proche de son domicile. Cela facilite la communication avec leurs services, permet d'être informé en cas de problème, et ouvre également la possibilité de voter par internet pour les élections législatives. Le corollaire est que notre adresse mail figure sur la liste électorale, à laquelle les candidats ont accès.

Ils en ont profité, et peut-être un peu abusé.

Je crois avoir supprimé un ou deux des premiers messages reçus, mais j'ai ensuite essayé de tous les conserver. Alors que la campagne du second tour va bientôt commencer, mon archive compte 34 messages, parmi lesquels :
  • 11 de l'UMP (dont quatre de la candidate aux législatives)
  • 10 du PS (dont seulement un de la candidate aux législatives)
  • 3 de EELV (deux pour la présidentielle, un du candidat aux législatives)
  • 2 du Modem (entièrement dédiés à la présidentielle)
  • 2 du FN (aussi dédiés à la présidentielle)
  • 1 du Front de Gauche (dédié à la présidentielle)
  • 1 de Dupont-Aignan (dédié à la présidentielle)
  • 4 de candidats indépendants pour les législatives (dont trois du même candidat)
Si on laisse de coté ces quatre derniers messages, il est amusant de comparer la proportion de messages avec les résultats auprès des français de l'étranger :

Candidat Proportion de messages envoyés Score au 1er tour à l'étranger
N. Sarkozy 36.67 % 38.00 %
F. Hollande 33.33 % 28.31 %
E. Joly 10.00 % 5.44 %
F. Bayrou 6.67 % 11.37 %
M. Le Pen 6.67 % 5.95 %
JL. Mélenchon 3.33 % 8.31 %
N. Dupont-Aignan 3.33 % 1.28 %
P. Poutou 0.00 % 0.70 %
N. Arthaud 0.00 % 0.28 %
J. Cheminade 0.00 % 0.36 %


Les candidats n'étant pour la plupart pas des nouveaux-venus dans le monde politique, et les résultats n'étant pas surprenant vus ceux de 2007, on peut légitimement se demander à quoi a servi cette distribution massive.

Dans l'ensemble, ces messages ne m'ont pas posé de problème. Leur qualité varie, mais on peut en dire de même des professions de foi reçues par voie postale. Leur quantité peut déranger, mais c'était une première, et les candidats de 2017 feront peut-être preuve de plus de modération.

Parmi tous ces messages, j'en vois quatre qui méritent qu'on s'y attarde.

Le premier d'entre eux, par ordre chronologique, est celui de François Bayrou le 30 mars. Vu son score, cela ne l'a peut-être pas beaucoup aidé, mais le message était bien pensé. En particulier, souligner l'expérience des français de l'étranger et leur proposer d'envoyer leurs avis et analyses me semble une bonne idée, aussi bien d'un point purement stratégique (ça fait plaisir au lecteur de l'email) que parce que ces analyses peuvent en effet être pertinentes sur certaines questions.

A l'inverse, celui reçu de Vincent Feltesse (responsable de la campagne numérique de François Hollande) le 12 avril est un parfait exemple de ce qu'il ne faut pas faire. Le seul objet du message est un appel aux dons, et il est mal avisé de confondre électeurs et militants. Je me demande d'ailleurs si ce type de message est autorisé. L'en-tête indique qu'il a été envoyé "à des fins d'informations comme la loi l'autorise", mais le contenu du message n'est pas vraiment informatif.

Le message de l'équipe de Jean-Luc Mélenchon, reçu le 15 avril, a le mérite d'être le seul à noter que tous les destinataires de l'email ne sont pas ravis de l'avalanche de messages : "Vous recevez ce courrier dans le cadre de la campagne électorale 2012. En effet, tel que le prévoit la loi, les listes électorales consulaires ont été transmises aux partis concourant à l'élection. Lors de la transmission à votre consulat, de votre adresse électronique, vous n'avez pas systématiquement été informés de cette modalité. Nous vous prions dès lors de bien vouloir excuser le désagrément si ce courrier vous importunait."

Le dernier message de la campagne du premier tour, envoyé par l'équipe de Marine Le Pen, a fait parlé de lui car il est arrivé samedi 21 avril, c'est-à-dire hors délai puisque la campagne se terminait le vendredi à minuit. Le Lab d'Europe 1 s'est penché sur ce retard. La défense du FN est de dire que le message a été envoyé vendredi, et qu'il y a eu quelques retards du fait du volume de la liste d'adresses à traiter, mais que ceux-ci "doivent être très marginaux". Mon échantillon est forcément très limité, mais je ne connais aucun français à l'étranger qui ait reçu cet email vendredi, quelque soit le pays de résidence.
On peut aussi noter que changer la date et l'heure sur l'ordinateur d'où l'email est envoyé produit exactement le même comportement (c'est-à dire un email daté du jour voulu mais passant sur les serveurs à la date courante). Difficile de savoir ce qu'il s'est réellement passé, mais on peut supposer que, la prochaine fois, les partis éviteront d'envoyer des messages au dernier moment.

La campagne pour le deuxième tour vient de commencer. Les premiers emails devraient donc bientôt arriver.

Introduction

Je suis français, mais je vis à l'étranger depuis de nombreuses années (Irlande, Japon, et de nouveau en Irlande). Mis à part quelques mois entre octobre 2004 et mars 2005, cela fait maintenant huit ans que je ne vis plus en France. Cela ne veut pas dire que je ne m'intéresse plus à ce qu'il s'y passe. Ma famille, ainsi que beaucoup de mes amis, y vivent. Avec les nouvelles technologies, il est d'ailleurs assez facile de suivre l'actualité française.

La principale différence est que je n'ai pas le vécu sur place, et que j'observe tout cela de l'extérieur. Ce n'est peut-être pas plus mal. Cela me permet en effet d'avoir un regard différent, qui je l'espère vous intéressera.

Je tiens déjà un autre blog, généralement plutôt axé sur la photographie, mais surtout tenu en anglais. Quand le temps me le permet (et c'est malheureusement assez rare), j'ai aussi un blog orienté sciences. A partir d'aujourd'hui, pour tout ce qui aura un rapport avec la France (ou la façon dont les médias français abordent des questions internationales), ce sera ici.

Dans un premier temps, je vais commencer par rapatrier ici les articles postés ailleurs. Cela sera indiqué clairement, et je vous invite à suivre les liens vers les articles originaux, car la discussion en commentaires s'y trouvera.